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Publication des nouvelles Lignes Directrices de la Commission Européenne sur les restrictions verticales : vers un assouplissement des normes qualitatives de distribution

Les nouvelles lignes directrices sur les restrictions verticales, adoptées dans le droit fil du Règlement d’exemption catégoriel n° 2022/720, ont été publiées par la Commission Européenne le 10 mai 2022 et, dans leur version en langue française, le 28 juin dernier (https://groupes.renater.fr/sympa/d_read/creda-concurrence/Doc/29juin2022/LignesDirectricesVerticales28juin2022.pdf).

Si ce document a le mérite d’opérer un dépoussiérage significatif de diverses problématiques intéressant notamment le commerce électronique, par le biais de l’assouplissement des restrictions des ventes en ligne, un point parmi d’autres retient particulièrement l’attention, à savoir celui relatif aux conditions dans lesquelles un fournisseur peut imposer des normes qualitatives à ses distributeurs, que ces derniers soient agréés ou non.

Sur ce point, les règles jusqu’à présent admises postulaient qu’un fournisseur désireux d’imposer des obligations de nature qualitative à ses distributeurs devait inscrire la vente de ses produits dans le cadre d’un réseau de distribution sélective, ou bien purement qualitative, ou bien tout à la fois quantitative et qualitative : la lourdeur des règles assortissant la mise en place d’un semblable système pouvait s’avérer dissuasive et conduire le fournisseur à lui préférer un système de distribution agréé, prévoyant au bénéfice des distributeurs la possibilité de l’octroi de réductions de prix de nature qualitative, en contrepartie du respect, par les distributeurs concernés, d’un certain nombre de normes ayant trait essentiellement aux conditions de présentation et de revente des produits.

En revanche, hors du cas de la mise en place d’un réseau de distribution sélective au sens strict, un refus de vente opposé par le fournisseur aux distributeurs considérés comme ne présentant pas des gages qualitatifs suffisants, demeurait susceptible d’être remis en cause sur le fondement des dispositions de l’article 101 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne prohibant les ententes anticoncurrentielles, notamment verticales.

En d’autres termes, le refus de vente ne pouvait être considéré comme définitivement admissible au regard du droit de la concurrence qu’à la condition que le fournisseur fût en mesure d’en justifier la pertinence, en considération des normes qualitatives imposées aux membres du réseau de distribution sélective.

A la lecture des nouvelles lignes directrices du 10 mai 2022, il semblerait que ce postulat ait été inversé, puisque le paragraphe 207 de ce document précise en effet ce qui suit :

« Les exigences imposées par le fournisseur à l’acheteur en ce qui concerne la manière dont les biens ou services contractuels doivent être vendus peuvent bénéficier de l’exemption prévue à l’article 2, paragraphe 1, du Règlement (UE) 2022/720, quel que soit le type de réseau de distribution. En particulier, le fournisseur peut imposer des exigences en matière de qualité. Par exemple, dans un système de distribution sélective, le fournisseur peut imposer des exigences relatives à la taille minimale et à l’apparence du magasin de l’acheteur […]. De même, le fournisseur peut imposer à l’acheteur des exigences relatives à la manière dont les biens ou services contractuels doivent être vendus en ligne […]. »

Ainsi, un fournisseur peut désormais, par principe, conditionner l’octroi de la distribution de ses produits au respect par le distributeur de normes qualitatives applicables non seulement à la revente en ligne de ses produits, mais également à la revente dans les points de vente physiques : la distribution sélective, citée à titre simplement illustratif, constitue un moyen parmi d’autres d’encadrer cette faculté qui dès lors peut être mise en œuvre dans d’autres types de réseaux, de distribution exclusive ou de franchise notamment, ou même hors du cadre de tout réseau statutaire, par le biais, par exemple, de stipulations qui seraient introduites dans les conditions générales de vente du fournisseur.

On peut imaginer que ce ne serait que dans l’hypothèse où ces normes qualitatives viendraient à engendrer un phénomène d’exclusion du marché que leur légitimité pourrait le cas échéant être remise en cause et que, sous cette réserve, la latitude des fournisseurs d’organiser qualitativement leur réseau, et donc d’opposer éventuellement des refus de vente aux distributeurs potentiels qui ne respecteraient pas ces normes de qualité, se trouve singulièrement accrue.

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