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Le 28 juillet 2020, le Bilan d’Activité 2019 de la Direction Générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (“DGCCRF”) a été présenté par Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’Economie et Virginie Beaumeunier, directrice générale.

L’année 2019 a été marquée par une activité de contrôle et d’enquête très soutenue de la part de la DGCCRF qui agit transversalement en faveur du respect des règles de la concurrence, de la sécurité physique des consommateurs et de la protection économique de ces derniers. Mais également, son bilan nous livre ses orientations en matière environnementale et numérique, sujets bien entendu très présents, sans oublier les nouveautés réglementaires au niveau interne et européen auxquelles elle contribue.

Ce bilan d’activité est très riche d’enseignements sur les actions très diverses et transversales de cette administration dont peut s’enorgueillir l’Etat français.

1.  Régulation et concurrence

  1. La lutte contre les pratiques restrictives de concurrence

En 2019, la DGCCRF a mené une enquête visant à vérifier le respect par les opérateurs de l’encadrement des promotions en valeur sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux de compagnie. Une baisse significative du nombre de manquements a été constatée au fur et à mesure de l’enquête. Désormais, les enseignes semblent reporter leurs opérations promotionnelles sur des produits non alimentaires ou sur des offres qui n’entrent pas dans le champ d’application de l’encadrement en valeur. Ce sujet a déjà évoqué dans la note d’actualité de janvier 2020 ainsi que dans celle de juillet 2020 sur la loi du 17 juin 2020.

La DGCCRF s’est attelée à préciser les modalités d’application du déséquilibre significatif et de l’avantage sans contrepartie. A ce titre, deux affaires ont été mises en évidence :

  • la société General Electric a été condamnée par la Cour d’appel de Paris le 12 juin 2019 pour soumission de ses sous-traitants à des clauses contractuelles traduisant un déséquilibre significatif ;
  • Amazon a été condamné par le Tribunal de commerce de Paris pour avoir imposé des clauses déséquilibrées aux vendeurs sur sa place de marché. En effet, dans sa décision du 2 septembre 2019, la juridiction commerciale a constaté que sept des onze clauses présentes dans les conditions générales d’utilisation d’Amazon créaient un déséquilibre significatif.
  • La lutte contre les pratiques anti-concurrentielles

L’Autorité de la concurrence a condamné, à la suite d’une enquête de la DGCCRF, le GIE taxis d’Antibes-Juan les Pins à payer une amende de 75 000€ par une décision du 28 mars 2019. Elle a considéré que le GIE avait mis en place des conditions d’adhésion et d’encadrement de l’activité de ses adhérents caractéristiques d’une infraction à l’article L. 420-1 du Code du commerce prohibant les ententes. L’action du GIE empêchait en effet l’essor de nouveaux modes de transport dans la commune et ses environs.

Par ailleurs, la DGCCRF a appuyé l’Autorité de la concurrence dans sa lutte contre la vie chère en outre-mer. Pour ce faire, dans un avis n° 19-A-12 du  4 juillet 2019, l’Autorité a identifié des leviers d’action et a formulé des recommandations, notamment concernant le commerce en ligne qui constitue un potentiel facteur de désenclavement des populations ultramarines et d’animation de la concurrence.

  • La lutte contre les retards de paiement

Les délais de paiement ont un impact direct sur la trésorerie des entreprises, et leur respect est primordial tant pour celle-ci que pour le bon fonctionnement de l’économie en général. A titre d’exemple, la DGCCRF a infligé, le 12 novembre 2019, une amende de 3,7 millions d’euros à la société SFR à la suite de manquements répétés au respect des délais de paiement entre entreprises. Selon la DGCCRF, les études relatives au respect des délais de paiement montrent que plus les entreprises sont de grande taille, plus les délais dans lesquels elles règlent leurs factures sont longs. Il s’agit là d’une priorité dans les contrôles conduits par la DIRECCTE et les opérateurs économiques doivent veiller au respect des délais de paiement ; ce point a été rappelé par le ministre de l’économie lors de la crise sanitaire afin d’éviter de nombreux dépôts de bilan.

2.  Sécurité du consommateur

La DGCCRF intervient fréquemment pour contrôler la sécurité et la conformité des produits alimentaires et industriels.  Il en va de même pour les services. Le but est de garantir une sécurité optimale du consommateur et les sanctions s’alourdissent très nettement ; nous sommes passés de quelques dizaines de milliers d’euros à plusieurs millions d’euros depuis la Loi Hamon du 17 mars 2014 !

A titre d’exemple, la DGCCRF mène chaque année un plan de contrôle des jouets afin de s’assurer de la sécurité de ces produits. Elle a par exemple diligenté des contrôles sur l’accessibilité des piles boutons et la présence de substances chimiques dans les jouets, notamment le « bore » dans les slimes jouets. L’utilisation du bore, substance utilisée pour rendre la pâte élastique, est encadrée par la réglementation spécifique aux jouets. La DGCCRF a effectué des contrôles en 2019 sur les slimes pâtes à modeler pour un taux de non-conformité de 4.5%. Concernant les piles boutons, la DGCCRF a renforcé en 2019 son action de contrôle sur ces produits en organisant une enquête sur la sécurisation de leurs emballages. L’enquête a permis de sensibiliser les professionnels aux risques sérieux liés à l’ingestion des piles boutons et a apporté des solutions techniques propres pour répondre à l’obligation générale de sécurité.

3.  Protection économique du consommateur

La DGCCRF a pour objectif de lutter contre les pratiques déloyales qui trompent le consommateur et faussent la concurrence. L’action de la DGCCRF s’est orientée sur les secteurs suivants : habitat, banque et assurances, santé, énergie et produits alimentaires, conformément au programme national d’enquête de 2019.

Concernant les produits alimentaires, le plan de contrôle des épices mis en place par la DGCCRF a révélé de nombreuses anomalies. Plus de 40% des analyses ont révélé la présence de colorants exogènes, d’anomalies d’étiquetage et de non-respect des critères de qualité.

De plus, de nombreux cas avérés de francisation des fruits et légumes ont été identifiés. A titre d’illustration, un grossiste a été condamné à une amende pénale de 100 000 euros pour avoir étiqueté des tomates “origine France” alors qu’elles provenaient de l’étranger.

Concernant le secteur de la rénovation énergétique de l’habitat, des campagnes massives de démarchage téléphonique ont fait l’objet d’enquêtes par la DGCCRF. En effet, les pratiques commerciales agressives telles que l’utilisation d’arguments fallacieux ont été constatées et poursuivies.

4. Focus sur le secteur vitivinicole

Afin de lutter contre la falsification des vins, les coupages illicites et la francisation abusive, la DGCCRF surveille la conformité des vins et spiritueux proposés aux consommateurs. Son contrôle s’effectue de la production à la distribution et se concentre essentiellement sur la vérification de la qualité, la protection des appellations d’origine et les mentions portées sur l’étiquetage. A titre d’illustration, un dossier concernant le “vin bleu” est en cours d’instruction en Corse. Par l’ajout d’un colorant bleu dans du vin blanc, cette pratique est constitutive de falsification de vin et susceptible de constituer une tromperie lorsqu’elle consiste à faire croire aux consommateurs qu’il s’agit d’une coloration naturelle.

Par ailleurs, la DGCCRF utilise une base de données isotopiques créée par les Etats-membres producteurs de vins, qui répertorie divers prélèvements de raisin. Cet instrument permet d’identifier des falsifications d’origine, d’appellation ou de millésime.

5. Environnement et développement durable

La DGCCRF vérifie la durabilité des produits et l’information du consommateur concernant le respect de l’environnement. Tout d’abord, les agents de la DGCCRF ont demandé la suppression des allégations environnementales valorisantes dans le secteur des produits chimiques. En effet, la réglementation interdit ces allégations afin de ne pas minimiser les risques liés à leur utilisation. Ensuite, les contrôles de la DGCCRF ont révélé que les professionnels maîtrisent mal la réglementation relative à l’étiquetage énergétique. Par ailleurs, de nombreuses irrégularités ont été sanctionnées dans le domaine des produits électroniques reconditionnés.

Enfin, les allégations “bio” ou “naturel” des cosmétiques sont souvent infondées. Les autorités de contrôle poursuivront leur action sur ce secteur en 2020. Or, n’oublions pas qu’avec la loi sur l’économie circulaire (LEC/du 10 février 2020), la réglementation va s’enrichir de nouvelles obligations qui entreront bientôt en vigueur.

6. La donnée et l’innovation au service des missions de la DGCCRF


La plateforme SignalConso a été lancée en France début 2020. Cette plateforme permet aux consommateurs de signaler des manquements à la DGCCRF, en toute transparence avec le professionnel concerné, qui a la possibilité de corriger le manquement.

Par ailleurs, la DGCCRF investit dans l’intelligence artificielle et développe actuellement un dispositif de repérage des faux avis sur internet.

De plus, un dispositif de recherche des clauses et pratiques abusives est en cours de développement afin de faciliter le travail des enquêteurs.

Enfin, le projet SESAM, lancé par la DGCCRF, consiste à concevoir une interface utilisable en mobilité permettant aux agents d’accéder aux données des entreprises et aux signalements des consommateurs.

7. Temps forts législatifs et réglementaires

Afin d’assurer une meilleure rémunération des agriculteurs, l’ordonnance n°2019-358 et l’ordonnance n°2019-359 prévues par la loi “EGAlim” ont été publiées le 24 avril 2019. D’une part, les conditions de sanction des prix abusivement bas ont été assouplies. D’autre part, les règles relatives à la transparence et aux pratiques restrictives de concurrence ont été simplifiées :

  • Les dispositions du Code de commerce relatives aux pratiques restrictives de concurrence ont été refondues afin d’être plus lisibles même si le droit de la négociation commerciale – à la française – est encore très complexe, il faut bien le reconnaître ; 
  • Les règles relatives à la facturation ont été clarifiées ;
  • Le formalisme des conventions en matière de relations commerciales a été réorganisé par la création d’un régime de droit commun applicable tous secteurs confondus et d’un régime plus spécifique pour le secteur de la distribution des produits de grande consommation ;
  • Le droit des pratiques restrictives de concurrence a été recentré autour du déséquilibre significatif, de l’avantage sans contrepartie et de la sanction de la rupture brutale des relations commerciales;
  • La prise en compte des indicateurs de coûts de production doit être précisée dans les conditions générales de vente et les contrats entre fournisseurs et distributeurs.  A cet égard, des lignes directrices sur les indicateurs egalim ont été publiées le 27 juillet 2020 par la DGCCRF. Celles-ci inversent le processus de construction du prix payé aux producteurs, en s’appuyant sur les coûts de production effectifs et prévoit la prise en compte d’indicateurs de ces coûts dans les contrats conclus entre les différents acteurs de la chaine agroalimentaire ; sujet très complexe pour les opérateurs économiques.

Nous ne reviendrons pas dans cette note d’actualité sur ces textes que nous avons longuement commentés mais restons à votre disposition pour vous accompagner dans la contractualisation amont ou aval.

En 2020, la DGCCRF a annoncé donner la priorité aux relations commerciales dans la filière agroalimentaire, et au contrôle du respect de la loi EGAlim ; on ne peut que s’en féliciter.

8. Travaux européens et coopération européenne

La DGCCRF contribue activement aux travaux menés dans le cadre des instances européennes, pour garantir aux consommateurs protection économique et sécurité. Elle a notamment participé à l’élaboration des positions françaises pour la négociation des textes du “Paquet produits” adoptés au premier semestre 2019.

La DGCCRF a traité en 2019 plus de 100 dossiers en matière de conformité des produits non alimentaires dans le cadre de la coopération européenne. Cette procédure permet à la DGCCRF de solliciter directement le metteur sur le marché situé dans une autre pays européen, quel que soit son statut juridique.

Dans ce cadre de coopération européenne, trois nouvelles directives ont été adoptées en matière de protection économique des consommateurs, et concernant plus précisément :

  • Le renforcement des garanties dans les contrats de vente de biens[1] ;
  • La création d’un régime de garantie légale de conformité concernant les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques[2];
  • Le renforcement de l’effectivité des acquis du droit européen de la consommation[3].

Concernant la transposition de ces directives, le Sénat a adopté un projet de loi le 8 juillet 2020, projet déposé à l’Assemblée nationale le 10 juillet 2020.

Depuis le 26 mai 2020, la DGCCRF est devenue l’une des deux autorités de surveillance du marché des dispositifs médicaux, auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

Le bilan d’activité 2019 de la DGCCRF témoigne donc d’une année de contrôles diversifiés. Pour 2020, la DGCCRF poursuit les investigations menées dans le domaine du numérique et continue son contrôle sur la loyauté des biens de consommation. Un objectif principal de la DGCCRF est de favoriser la transition écologique. A ce sujet, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire a été publiée au Journal Officiel le 11 février 2020.


[1] Directive n°2019/771/UE du 20 mai 2019

[2] Directive n°2019/770/UE du 20 mai 2019

[3] Directive n°2019/2161/UE du 27 novembre 2019

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